Un moment de l’Union européenne pour les droits de l’homme

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Taslima Begum, une femme au foyer du quartier 8, a exigé des toilettes publiques dans son quartier, municipalité de Paikgacha, Khulna, Bangladesh, 2014.
Image: WaterAid/ Habibul Haque

Les directives de l’Union européenne (UE) relatives aux droits de l’homme en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène doivent être saluées. Louisa Gosling, responsable des programmes de qualité chez WaterAid UK, présente un nouvel outil pour aider à les rendre pertinentes au niveau local.

L’UE a publié ses directives en matière de droits économiques et sociaux

Le Conseil des affaires étrangères marque-t-il un tournant décisif dans son approche des droits de l’homme ?

Au cours des deux dernières décennies, l’Union européenne (UE) s’est uniquement concentrée sur les droits civils et politiques. Toutefois, lundi, elle a adopté des directives axées pour la première fois sur les droits économiques et sociaux.

Est-ce le signe d’un nouvel élan politique en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène (WASH) au niveau de l’UE ? Si c’est le cas, il était grand temps. Après tout, l’eau et l’assainissement ont été déclarés droits de l’homme d’abord ensemble en 2010 et ensuite séparément en 2015 et sont extrêmement importants.

L’eau, l’assainissement et l’hygiène sont essentiels pour le développement, mais sont depuis longtemps mis de côté.

L’importance de l’agenda UE/WASH en ce qui concerne les programmes de développement et de coopération a diminué ces derniers temps. En sept ans, le nombre d’initiatives nationales soutenues par l’UE dans ce domaine a chuté de 50 %.

Mais le secteur WASH devrait être en tête des priorités de développement - il sous-tend bon nombre des Objectifs de développement durable (ODD). Le manque d’eau propre, de toilettes décentes et de bonnes conditions d’hygiène sape les efforts déployés pour améliorer la santé, l’éducation et la sécurité financière. Il fait régresser des vies, des nations et l’ensemble du programme de développement.

Les directives doivent montrer la voie aux délégations, aux institutions et aux États membres de l’UE pour mettre en œuvre les politiques de développement. Elles doivent essentiellement permettre aux autorités locales des pays à faible revenu, qui apportent des améliorations dans les services WASH, de se concentrer sur la redevabilité, une meilleure compréhension et des investissements ciblés.

Des villageoises se lavent et se baignent dans un étang à Chalna Bazar, au Bangladesh.
Des villageoises se lavent et se baignent dans un étang à Chalna Bazar, au Bangladesh.
Image: WaterAid/ Abir Abdullah

Les inégalités d’accès aux services WASH sont encore importantes

Dans l’UE, nous disposons d’un cadre réglementaire strict pour l’eau et l’assainissement, ce qui signifie que nos citoyens peuvent, pour la plupart, considérer l’approvisionnement en eau propre et un bon assainissement comme allant de soi. Mais pour les personnes vivant dans des pays où l’accès aux services d’eau et d’assainissement est très limité, la situation est différente.

Le manque de responsabilité locale explique en partie pourquoi près de 2,3 milliards de personnes n’ont pas accès à des installations sanitaires adéquates et 844 millions n’ont pas accès à l’eau potable. Cette situation se conjugue à une mauvaise compréhension de l’obligation de fournir ces services et à un manque de ressources pour agir dans ce sens.

Les directives manquent de détails - nous avons la réponse

Les nouvelles directives, bien qu’elles soient ambitieuses, manquent de détails. Elles ne fournissent peut-être pas suffisamment de conseils pratiques aux fonctionnaires des niveaux les plus bas des gouvernements locaux, dont certains sont peut-être novices en matière de droits de l’homme dans le domaine de l’eau et de l’assainissement.

La bonne nouvelle est qu’il existe un outil pragmatique visant précisément à rendre les droits de l’homme à l’eau et à l’assainissement aussi opérationnels que possible. Lors des Journées européennes du développement de cette semaine , nous présentons « Making Rights Real » - notre projet visant à aider les responsables des gouvernements locaux dans certaines des régions les plus pauvres du monde à faire progresser leurs communautés en utilisant une approche basée sur les droits de l’homme pour améliorer l’accès au WASH.

Cet outil, déjà utilisé dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud, aide les autorités locales à comprendre clairement leur responsabilité en matière d’accès universel, tout en appliquant les principes des droits de l’homme d’égalité et non-discrimination, de durabilité, de responsabilité, de participation et d’accès à l’information.

L’accès à l’eau et l’assainissement des communautés les plus pauvres représentent un défi immense. Making Rights Real aide les responsables gouvernementaux et les communautés à discuter de la manière de surmonter ces défis, afin de faire parvenir l’eau et l’assainissement à tout le monde. Nous devons collectivement changer notre mentalité pour reconnaître que chaque jour où quelqu’un vit sans eau ni assainissement, ses droits fondamentaux sont violés.

Making Rights Real est une initiative de création de partenariats et elle fonctionne déjà. En Éthiopie, elle a aidé les prestataires de services à collaborer avec le gouvernement local pour renforcer les procédures de responsabilité communautaire, afin d’évaluer le travail effectué. En Inde, les fonctionnaires locaux ont amélioré l’accès des personnes handicapées aux toilettes après que l’outil les ait aidés à prendre conscience de la portée des droits de l’homme.

Nous devons profiter de ce moment

S’il s’agit effectivement d’un changement significatif dans l’approche de l’UE en matière de droits de l’homme, nous devons l’accueillir et l’utiliser, et nous assurer que la dynamique mène à la réalisation des droits au WASH. Au cœur de la réflexion de l’UE doit se trouver un engagement concret et pas seulement des mots. Exploitons la puissance de l’UE pour faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte. Si nous ne le faisons pas, les inégalités ne feront que s’aggraver en fonction des revenus, de la géographie, du handicap, du sexe et du groupe social.

C’est un moment pour l’UE, un moment où nous pouvons faire d’énormes progrès pour que chacun, partout, puisse jouir de ces droits humains. Des moments comme celui-ci ne se produisent pas souvent. Profitons de cette occasion.

Rejoignez-nous aux Journées européennes du développement, stand 29, pour en savoir plus. Suivez @EUWaterAid pour plus de détails.

Louisa Gosling est responsable des programmes de qualité chez WaterAid UK. Suivez la à @LouisaGosling1