WASH-BAT : six leçons pour améliorer l’assainissement à l’aide d’outils d’analyse sectorielle

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A group of people gather for a community hygiene promotion session in Kampong Speu Province, Cambodia.
Image: Ms. Nop Mana/PDRD Kampong Speu

Les outils de planification et de suivi aident les programmateurs en matière d'eau, d'assainissement et d'hygiène à élaborer des solutions durables et adaptées au contexte. Sokha Mok partage ce que l'UNICEF et WaterAid Cambodge ont appris au cours des six mois d'utilisation des outils d'analyse sectorielle, notamment WASH-BAT, un outil d'analyse des goulets d'étranglement liés aux interventions WASH, pour soutenir le travail du gouvernement régional visant à mettre fin à la défécation en plein air.

Entre 2000 et 2017, plus de la moitié de la population du Cambodge a cessé de déféquer en plein air. C'est un progrès fantastique, mais 32 % des gens continuent de pratiquer la défécation en plein air, faute d'installations d'assainissement adéquates et de services qui leur offrent une alternative.

En 2018, le gouvernement a établi un objectif national visant à atteindre trois provinces sans défécation à l'air libre d'ici 2022 (en janvier 2020, il a étendu cet objectif à cinq provinces d'ici 2023). Réagissant rapidement, les provinces de Kampong Speu et de Svay Rieng ont élaboré des plans d'action provinciaux pour devenir sans défécation à l'air libre.

Depuis fin 2018, le programme d'accélération Assainissement et eau pour tous, exécuté par l'UNICEF en partenariat avec WaterAid Cambodge, soutient les initiatives des deux gouvernements locaux visant à faciliter la planification provinciale sans défécation à l'air libre en utilisant WASH-BAT, « WASH Bottleneck Analysis Tool », un outil de planification et de suivi développé par l'UNICEF.

Participants watch a presentation in the WASH–BAT Lite Workshop in Kampong Speu Province, Cambodia.
Les participants assistent à une présentation lors de l’atelier WASH-BAT Lite dans la province de Kampong Speu, au Cambodge.
Image: WaterAid/Dina Kuy

Comment nous avons utilisé WASH-BAT en pratique

Pour discuter et comprendre la situation des programmes liés à l'eau, l'assainissement et l'hygiène (EAH) dans la province, notamment les opportunités et les défis, le personnel de WaterAid Cambodge et de l'UNICEF a organisé un atelier au niveau infranational avec les parties prenantes, notamment le département provincial du développement rural, une agence leader en matière de WASH et un secrétariat du groupe de travail provincial. En plus de permettre aux équipes de comprendre le contexte local, le processus a permis d'informer et de renforcer le leadership et l'appropriation de la planification par le gouvernement local afin d'assurer que l'objectif provincial « sans défécation à l'air libre » est atteint.

Sur la base des enseignements tirés de l'atelier, nous avons développé avec l'UNICEF des versions simplifiées et contextualisées des outils d'analyse WASH-BAT et de renforcement des systèmes de WaterAid, tous adaptés spécifiquement aux provinces. Nous avons traduit les outils dans les langues locales, afin qu'ils puissent être utilisés pour analyser et comprendre la situation actuelle et la force du système EAH pour atteindre l'objectif « sans défécation à l'air libre ».

Le processus de planification, qui comprenait l'utilisation de Repenser l'assainissement rural, un ensemble de ressources de planification développé par l'UNICEF, WaterAid et Plan, nous a permis de cartographier les différents types de communautés au sein de la commune cible. Les communautés ont été classées en fonction des typologies suivantes : communautés rurales éloignées, communautés rurales sur route et communautés rurales mixtes. Ce point est important pour la planification des programmes d'intervention et des approches de mise en œuvre à utiliser dans chaque communauté, et il est pris en compte dans le plan de district « sans défécation à l'air libre ».

Participants sit at the WASH–BAT Lite Workshop in Svay Rieng Province, Cambodia.
L’atelier WASH–BAT Lite dans la province de Svay Rieng, Cambodge.
Image: WaterAid/Sokha Mok

Ce que nous avons appris après six mois de promotion de services WASH durables à l'échelle

  1. L'engagement de haut niveau du gouvernement national à mettre en œuvre l'objectif provincial « sans défécation à l'air libre » a fortement contribué à inciter les autorités locales à redoubler d'efforts et d'engagement pour atteindre les objectifs fixés.
  2. Le timing était important. Le processus de planification « sans défécation à l'air libre » a été organisé juste après la préparation du plan d'action provincial, et nous avons invité de nombreuses parties prenantes qui y avaient participé, notamment les membres des groupes de travail provinciaux. Grâce à plusieurs processus de consultation, les participants ont pu facilement réfléchir et établir des liens entre les activités pertinentes qui avaient été convenues dans le plan d'action provincial, et les inclure dans le plan « sans défécation à l'air libre ».
  3. Le renforcement des capacités demande du temps et des ressources. Pour assurer la pérennité du programme à grande échelle, il fallait qu'il soit dirigé par le gouvernement, avec les dispositifs institutionnels, la motivation et les savoir-être en place nécessaires pour le soutenir. Cela nécessite des ressources plus spécialisées et un investissement supplémentaire en ressources et en temps pour renforcer la capacité des partenaires gouvernementaux à maintenir l'élan parmi les responsables de la mise en œuvre du programme et leurs partenaires afin de continuer à utiliser leurs ressources.
  4. La décentralisation pourrait renforcer le secteur WASH au niveau infranational. L'administration de district sera la clé du succès, qui nécessite un engagement fort, des engagements et un bon leadership pour montrer les arguments et les preuves de l'accélération de leurs réalisations.
  5. L'outil WASH-BAT a été utile pour structurer une analyse du secteur. Les acteurs provinciaux qui ont participé à l'atelier ont estimé qu'il les a informé, les a aidé à réfléchir à la situation de leur programme, et les a orienté sur les domaines auxquels ils devraient donner la priorité.
  6. L'appropriation par le gouvernement doit augmenter. Bien que les participants, notamment le gouvernement, reconnaissent l'utilité de l'évaluation des goulets d'étranglement, il existe encore des lacunes dans la direction du gouvernement lorsqu'il s'agit de détourner les ressources et les investissements vers le renforcement des capacités et des fonctions du système global, plutôt que de se concentrer uniquement sur la création de nouveaux services. Les outils sont bons pour renforcer le secteur WASH, mais il est nécessaire que le gouvernement s'approprie et investisse davantage dans le maintien des systèmes EAH, plutôt que de se reposer sur l'amélioration du travail de fourniture de services.

Les défis que nous avons rencontrés dans la mise en œuvre de WASH-BAT, et les défis plus larges du secteur de l'assainissement

  1. Il existe une capacité limitée de coordination dans les administrations infranationales, en particulier au sein du département provincial du développement rural, ou pour comprendre l'ensemble du renforcement du secteur.
  2. Les approches des outils pour aborder l'égalité des genres et la gestion de l'hygiène menstruelle et les problèmes des groupes marginalisés en ce qui concerne l'accès aux services WASH sont limités.
  3. L'implication des équipes de gestion technique et financière du gouvernement est essentielle lors de ces évaluations afin de garantir la disponibilité d'informations précises.
  4. Au Cambodge, certaines des analyses incluses dans l'outil WASH-BAT ne peuvent être appliquées que pour une évaluation au niveau national ou régional, l'appliquer au niveau local fournirait des informations limitées, car il faut une connaissance du secteur, une facilitation, notamment l'engagement des parties prenantes et la capacité à l'appliquer.

Que ferions-nous différemment la prochaine fois ?

  1. Sensibiliser à l'avance les partenaires locaux sur les définitions, les critères des éléments constitutifs du secteur et la façon dont ils sont reliés.
  2. Fournir des explications complètes au gouvernement sur les raisons pour lesquelles il doit renforcer le secteur à tous les niveaux, plutôt que de se concentrer uniquement sur l'amélioration des infrastructures et du modèle de fourniture de services.
  3. Sélectionner les participants les plus appropriés qui sont pleinement impliqués dans le secteur WASH. Ils doivent être issus des départements de planification, de suivi et de budgétisation, ainsi que de la direction, et inclure des partenaires clés du secteur privé et des ONG.
  4. Allouer plus de temps. La discussion et la clarification ont pris beaucoup de temps, plus de temps pourrait profiter à l'apprentissage des participants.

Sokha Mok est coordinateur de programme à WaterAid Cambodge.